Comment vous êtes-vous épris du graffiti ?
Deyaa Rambo : J’ai commencé le graffiti en 2005. Je suis né dans une famille d’artistes. Mon père est professeur d’arts plastiques, ma mère aussi. A l’époque, j’ai rencontré quelques graffeurs, ici, à Djeddah. Nous avons développé une belle amitié, et avons continué à pratiquer ensemble le street art. Nous n’avions pas de vraies connaissances sur le sujet. Nous apprenions des techniques en cherchant sur Google. Nous avons réalisé que ce qu’il nous manquait, surtout, c’était le matériel.
Abdulaziz Hassan (gauche) et Deyaa Rambo (droite) dans l’atelier de Dhad Store
C’est de là qu’est née votre boutique, Dhad Store ?
Deyaa Rambo : En 2009, je faisais mes études en Nouvelle-Zélande, et j’y ai visité une boutique de graffiti pour la première fois de ma vie. J’ai vu tous ces produits, j’en ai acheté, et je n’ai pas arrêté de penser à comment faire en sorte qu’il y ait la même chose en Arabie saoudite. Avec Abdulaziz et notre ami Abdallah, nous avons réfléchi à comment ramener ces produits ici pour les utiliser et en vendre à nos amis. C’est comme ça que Dhad a démarré. Aucun d’entre nous n’avait de réelles connaissances en affaires. Alors nous avons simplement commencé par passion pour l’art. Nous avons démarré en 2011, en important des bombes de graffitis et des marqueurs. Nous les vendions chez nous, enfin, chez Abdallah, plutôt. Nous en faisions la promotion sur Facebook et à travers nos amis. Nous avons poursuivi ainsi durant un an. En 2012, nous avons arrêté parce qu’Abdallah partait vivre au Royaume-Uni. Je me suis dit que je ferai ça avec mes propres moyens.
"Quand nous avons commencé à graffer, les gens nous disaient que ce n’était pas de l’art. Nous avons souvent eu ces commentaires. Nous avons réalisé que c’était un grand défi de faire en sorte que les gens nous voient en tant qu’artistes."
Deyaa Rambo
Pourquoi ce nom, « Dhad », et ce logo, l’ours ?
Deyaa Rambo : Le nom Dhad est un hommage à la langue arabe, la langue de la lettre « dhad ». L’idée, derrière cette marque, est de marier la culture arabe et celle du graffiti.
Abdulaziz Hassan : Après avoir dessiné le logo, nous nous sommes rendu compte qu’il reflétait parfaitement l’identité de Dhad, de part la rigueur dans notre travail, et le calme de nos personnages.
Abdulaziz Hassan (gauche) et Deyaa Rambo (droite) devant une de leurs fresques à Djeddah
Le street art, cette boutique, votre style… Tout cela dénote un peu avec la culture et les codes vestimentaires en Arabie saoudite…
Deyaa Rambo : Dhad ce n’est pas une histoire de produits à vendre. C’est plutôt une histoire de style, d’art de vivre. L’idée c’est simplement d’exprimer ce que nous sommes en portant, par exemple, les habits que nous aimons.
A vos débuts, quel écho avait le street art en Arabie saoudite ?
Deyaa Rambo : Quand nous avons commencé à graffer, les gens nous disaient que ce n’était pas de l’art. Nous avons souvent eu ces commentaires. Nous avons réalisé que c’était un grand défi de faire en sorte que les gens nous voient en tant qu’artistes.
Abdulaziz Hassan : A cette époque, le graffiti était méprisé. Nous étions en train de faire du graffiti dans un endroit qui n’aimait pas le graffiti ou qui en avait une mauvaise idée. C’était un immense défi d’expliquer au gens que dans le graffiti, il y a un miroir de notre société arabe.
"Nous voulions que les vocations apparaissent au grand jour, et montrer que lorsque l’on se préoccupe moins de choses matérielles, nous pouvions révéler de purs artistes."
Abdulaziz Hassan
Aujourd’hui, vous collaborer avec des marques et des artistes internationaux…
Deyaa Rambo : Nous avons collaboré avec plusieurs marques de streetwear, comme G-Shock dont nous avons été les ambassadeurs. Nous avons aussi travaillé avec Carhartt. Nous avons fait plusieurs collaborations à l’étranger, en Allemagne, à Paris, au Maroc, en Tunisie, au Koweït, à Dubaï, à Bahreïn… Nous avons collaboré avec de grands artistes, notamment en Allemagne, avec Hombre, Rusl, Loveletters Crew, Dater… Tous ces artistes, pour nous, ce sont des légendes. Avant, on ne faisait que les « liker » sur Facebook et Instagram.
Et vous organisez des événements publics en Arabie saoudite…
Abdulaziz Hassan : Nous avons organisé plusieurs événements ici. Parmi ceux-ci, il y a eu Mirkaz. C’est un événement dont le but était de promouvoir notre société. Nous avons initié le projet chez Dhad et avons été rejoint par plusieurs amis par la suite. Nous avons imaginé cet événement aussi pour pour mettre en valeur l’art de rue. Nous voulions que les vocations apparaissent au grand jour, et montrer que lorsque l’on se préoccupe moins de choses matérielles, nous pouvions révéler de purs artistes.